« Que la Flandre applique à Brussels Airport ce qu’elle exige pour Liège »

Lesoir.be
5 mai 2023

Le gouvernement bruxellois a adopté l’avis qu’il compte donner à la Flandre dans le cadre de la procédure de renouvellement du permis de Brussels Airport. Nuisances sonores, santé publique et climat sont au cœur des préoccupations bruxelloises. Bruxelles demande à la Flandre (qui ne lui a rien demandé) d’être logique et d’appliquer à Zaventem ce qu’elle réclame à l’aéroport de Liège. Article réservé aux abonnés

Le gouvernement bruxellois, ministres flamands compris, a adopté le contenu de l’avis sur le renouvellement du permis d’environnement de l’aéroport (national) de Bruxelles, exploité par la société BAC (Brussels Airport Company). La Région bruxelloise donne ainsi un avis que son homologue flamande ne lui a pas demandé (ce n’est pas prévu dans la procédure, qui est entièrement menée par la Région flamande et qui ne doit consulter que quelques communes flamandes), en reconnaissant toutefois que l’avis de Bruxelles-Capitale a été sollicité par la Flandre lors du rapport d’incidences environnementales préalable. A savoir si l’avis du gouvernement bruxellois transmis « pour information » à la Flandre pourrait être suivi d’une version moins diplomatique en justice, Alain Maron (ministre bruxellois Ecolo de l’Environnement et de la Transition climatique) reste dans le registre de la conciliation. Jusqu’à preuve du contraire.

L’avis du gouvernement se fait officiellement avec le soutien des ministres flamands du gouvernement (Groen, Open VLD, Vooruit). « Il y a eu discussion, comme dans chaque gouvernement, mais plutôt sur la formulation de notre position qui s’inscrit, de toute façon, dans le cadre fixé par l’accord de gouvernement bruxellois », déclare Alain Maron. Le ministre détaille les doléances et réclame notamment que la Flandre respecte la logique qu’elle réclame pour Liège Airport. Il demande ainsi « de mettre en œuvre une période d’horaire de nuit de 22h à 7h du matin. A noter que la Région flamande, dans son recours contre le permis d’environnement de l’aéroport de Liège-Bierset (points 41 et 42), considère que “ la période prévue dans le permis de 23h à 6h ne satisfait pas à cette garantie minimale de repos nocturne, ce qui est inacceptable. La cliente (NDLR : La Flandre) vise à obtenir une période de repos nocturne garantie la plus longue possible ”. »

Le Ministre Alain Maron rappelle aussi la récente étude du bureau Envisa pour le compte du Bond Beter Leefmilieu qui soulève que l’activité de Brussels Airport a des répercussions sur la santé des riverains (hypertension, problèmes cardiaques, pathologies liées au bruit…). Cela pèse lourdement sur le système de sécurité sociale (plus d’un milliard d’euros par an, soit 36.000 euros par vol de nuit), et donc sur l’économie nationale. Et ne manque pas non plus d’y ajouter les indéniables impacts environnementaux et climatiques de l’activité aéroportuaire et aérienne (l’un ne va pas sans l’autre). « Sachant que l’aéroport demande un renouvellement de permis illimité dans le temps, la Région flamande se trouve à un momentum important pour agir concrètement sur le respect de la nuit (22h-7h), sur les quotas de bruit octroyés aux avions afin d’éliminer rapidement les plus bruyants, sur une diminution du bruit total annuel (-5 % par an par rapport à 2019), et pour que les sauts de puce soient limités lorsqu’une alternative ferroviaire de moins de 6h est possible de gare à gare et, enfin, pour qu’on améliore la transparence et la concertation avec les communes et les riverains » résume Alain Maron.

D’un point de vue plus général et concernant les impacts sur le climat, le ministre est persuadé que « la décarbonisation de l’aviation passe immanquablement par la limitation des vols. Autant il existe des solutions pour les autres types de transport (électricité, hydrogène) autant la solution technique avancée pour les avions, l’usage de carburant de synthèse, s’avère excessivement énergivore. Si on veut vraiment être zéro carbone en 2050, il faut un vrai changement et réserver l’aviation, par exemple, aux produits qui en ont vraiment besoin. »

Quant à savoir si le ministre, et/ou le gouvernement, pourrait aller en justice si ces souhaits ne sont pas exaucés, Alain Maron reste prudent. Il rappelle que la Région bruxelloise va déjà retourner en justice contre le fédéral (condamné à réaliser une étude d’incidence et à mettre en place différentes mesures dont les riverains et la Région ne voient pas l’effet sur la vie quotidienne) et concernant les astreintes qui y étaient liées. « Envers la Flandre, on va voir ». La phase diplomatique est visiblement toujours en cours.

Le renouvellement du permis d’environnement de l’aéroport national/Brussels Airport doit être accordé avant début juillet 2024.

Eric RENETTE