Brussels Airport pris en flagrant délit d’intox

LaLibre.be
06/01/2017

Zaventem annonce des milliers de pertes d’emplois à cause de Bruxelles. Mais aucune compagnie n’est partie…

Faut-il encore croire les affirmations de la direction de l’aéroport national ? Depuis que la Région bruxelloise a annoncé le durcissement de sa politique de répression des dépassements de normes de bruit, Brussels Airport rivalise de propos alarmistes avec les autorités flamandes. Ainsi Geert Bourgeois (N-VA), ministre-Président flamand, a-t-il annoncé que trois compagnies cargo quitteraient les installations de Zaventem en raison des normes de bruit trop contraignantes dans le ciel bruxellois. Selon le ministre-Président flamand, près de 3 500 emplois directs et indirects étaient menacés.

L’une de ces compagnies, Saudia Cargo, un bon client, aurait même arrêté définitivement ses activités à Bruxelles dès le 31 décembre 2016 pour déménager à Francfort, avait assuré Brussels Airport à « La Libre » mercredi. Petit problème : cette information est inexacte; la compagnie saoudienne opère toujours depuis l’aéroport national, quasiment à un rythme d’un vol par jour depuis le 1er janvier, comme ont confirmé à « La Libre » différentes sources officielles, dont le service de médiation de l’aéroport. Pour le vérifier, il suffit en outre de recouper les horaires de vol présentés par le transporteur avec les mouvements répertoriés par le site Flightradar (voir photo ci-dessous).

Contactée par « La Libre », Saudia Cargo nous renvoie d’ailleurs à son programme de vols qui stipule la poursuite des opérations à Zaventem jusqu’au 25 mars prochain, sans avancer la moindre date de départ.

Egalement contacté jeudi, Brussels Airport s’est d’abord montré « surpris » d’apprendre que la compagnie saoudienne opérait toujours. « Ils nous avaient prévenus qu’ils partiraient fin décembre, explique une porte-parole. Ce n’est qu’une simple question de droits de trafic que la compagnie n’a pas encore pu obtenir en Allemagne. Mais cela va très vite dans le fret et dès qu’ils obtiendront ces droits, ils partiront. » Toujours selon l’aéroport, deux autres compagnies cargo devraient plier bagage vers Amsterdam très prochainement : la chinoise Yangtze River Express (« une certitude ») et Singapore Airlines Cargo. Cette deuxième, moins affirmative, pourrait toutefois rester si les normes de bruit sont revues.

« Brussels Airport fait du chantage à l’emploi »

D’après nos informations, aucune de ces deux compagnies n’a toutefois déjà pris les mesures nécessaires (notification de fin de créneaux horaires notamment) pour effectivement déménager de Bruxelles. Il est aussi vrai que deux autres transporteurs de fret qui opèrent avec un Boeing 747, l’un des avions les plus bruyants et donc le plus soumis aux amendes de Bruxelles, envisagent de quitter Zaventem.

L’autre grande interrogation porte sur le nombre d’emplois. Les chiffres évoqués par les autorités flamandes et l’aéroport ont fluctué, avant d’en arriver à cette version : 2 000 emplois ont été perdus dans le cargo depuis 2007 et 1500 autres sont menacés. Tout cela est théorique et se base sur une norme internationale : 100 tonnes de fret par an correspondent à un emploi.

Pour un connaisseur du dossier, cette méthode de calcul est toutefois « dépassée » et ne correspond plus à la réalité actuelle où une certaine automatisation s’est installée dans le fret. Selon lui, l’aéroport joue « clairement la carte du chantage à l’emploi » pour tenter de convaincre les autorités bruxelloises de renoncer à ce durcissement des normes de bruit.

M. Co. et R. Meu