Les effets nocifs de l’activité aéroportuaire nocturne sur les riverains

Somnolence diurne, risque d’hypertension et d’infarctus guettent les voisins des sites.
L’étude d’un scientifique liégeois confirme les travaux réalisés précédemment.

Après les études internationales sur les effets de l’activité aéroportuaire nocturne sur la santé des riverains, le rapport d’un scientifique liégeois vient confirmer ce que l’on redoute depuis longtemps. Le bruit des avions affecte les performances de ceux qui vivent à côté des aéroports.

La discrétion entretenue autour du rapport témoigne tant de son importance que de son caractère explosif. «Une exposition au bruit produit immanquablement des séquelles négatives sur les performances. Après exposition au bruit de trafic aérien, on relève chez les élèves du voisinage d’un aéroport de Los Angeles, des déficiences à la correction d’épreuves de lecture et dans la persévérance lorsqu’ils sont confrontés à des constructions de puzzles», indique le professeur Robert Poirrier de l’Université de Liège et dont le rapport est frappé d’un grand sceau de confidentialité.

Dans son rapport, il relate la recherche prospective sur les enfants d’âge scolaire et victimes des nuisances sonores de l’aéroport de Munich. Le constat a confirmé les déficiences chez les élèves de l’aéroport de Los Angeles. «On note une augmentation du dommage avec la prolongation du temps d’exposition pour les bruits du trafic aérien», écrit-il, rappelant la recommandation de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) qui demande une grande attention aux cas des groupes vulnérables. Elle désigne sous ce vocable les enfants, les vieillards et les gens affectés d’une maladie préalable, en particulier la dépression. «Ces personnes n’ont pas les mêmes capacités de s’adapter à un bruit ambiant non désiré».

Trouble du sommeil

L’étude de l’expert liégeois confirme également la perturbation du sommeil causée par le bruit des avions. La conséquence est un risque accru de somnolence diurne, susceptible d’être à l’origine d’accidents parfois dramatiques. «Si au niveau biologique, la somnolence diurne excessive intervient bien à titre de protection comportementale, elle s’avère toutefois dangereuse et coûteuse dans les conditions de vie sociale de l’homme moderne (200€/habitant/an)», rapporte Robert Poirrier.D’après le document, le bruit (en l’occurrence celui des avions) serait source de fatigue, d’hostilité, d’anxiété et d’humeur dépressive que l’on peut observer chez certains riverains d’aéroport. La restriction du sommeil provoque aussi des dégradations des défenses immunologiques et de la sécrétion de l’hormone de croissance (surtout préjudiciable chez l’enfant).

Compulsant les travaux réalisés précédemment, il en arrive au constat que le bruit, par ses effets sur le système nerveux au cours du sommeil est un «facteur exogène pour le développement de l’athérosclérose, de l’hypertension et de l’infarctus».

Les études menées sur la consommation de tranquillisants et d’hypnotiques et sur les taux d’admission dans les services de santé mentale dans des zones bruyantes laissent à penser que le bruit non désiré a des effets défavorables sur la santé mentale des habitants.

Après avoir passé en revue les effets nocifs du bruit sur l’organisme humain, il formule des recommandations qui relèvent d’un principe de précaution. «Nous retenons que pour les gens sains, on ne doit pas dépasser de nuit des niveaux de 32 décibels et des niveaux de crête de bruit de 40 décibels (niveau d’exposition sonore) dans les chambres à coucher des riverains d’aéroports. Ceci correspond à la norme allemande officielle, publiée sous forme de ligne de conduite», conclut-il. Pour lui, le caractère récent des méthodologies et le coût élevé d’études rigoureuses des effets du bruit des aéroports sur la santé mentale expliquent leur rareté ou leur caractère incomplet.

Ph.Lawson

© La Libre Belgique 2004