Intervention de J. Parmentier au Parlement bruxellois

Certains considĂšrent que l’accord fĂ©dĂ©ral sur le plan Anciaux est « victoire irrĂ©vocable de leur camp sur celui des bruxellois ».

Nous savons que cet Ă©pisode n’a rien de dĂ©finitif. Ce que le politique a fait, le politique peut le dĂ©faire ou le parfaire.
Le caractÚre provisoire de cette décision est officiellement confirmé par le Conseil des Ministres fédéraux du 3 décembre 2003 qui stipule que le régime
qui a Ă©tĂ© approuvĂ© est immĂ©diatement exĂ©cutable mais qu’il doit ĂȘtre considĂ©rĂ© comme un rĂ©gime provisoire qui sera rĂ©examinĂ© aprĂšs Ă©valuation complĂšte et validation du cadastre de bruit sur une pĂ©riode suffisamment longue.

Mon intervention portera donc aujourd’hui essentiellement sur ce que l’on appelle dĂ©sormais le « cadastre » du bruit. Quels seront les moyens budgĂ©taires, matĂ©riels et humains qui seront mis en ouvre pour le rĂ©aliser ?
Quels seront les critÚres qui seront définis pour la fixation des limites de bruit admissibles ? Quand appliquerons-nous ces critÚres ?

Le problĂšme pour notre RĂ©gion c’est malheureusement, Monsieur le Ministre, que vous partez toujours Ă  l’heure Ă  laquelle vous devriez arriver. Il n’est dĂšs lors pas Ă©tonnant que nous soyons toujours en retard dans ce dossier
crucial.

C’est parce que vous ne disposiez pas, Monsieur le Ministre, d’un cadastre bruxellois contradictoire que le Ministre Anciaux a pu duper le Gouvernement
fédéral en noyant son discours dans des termes incompréhensibles et en taisant certaines conséquences de ses décisions.

Au cours des nĂ©gociations, le Gouvernement fĂ©dĂ©ral avait Ă©tĂ© informĂ© par la Commission d’avis sur les nuisances sonores (commission composĂ©e de l’IBGE,
d’AMINAL et de la BIAC) que les mesures sonomĂ©triques relevĂ©es lors des nuits du mois d’aoĂ»t 2003 confirmaient Ă  95% le modĂšle thĂ©orique de contour de bruit rĂ©alisĂ© par la KUL. A ce moment, le Gouvernement fĂ©dĂ©ral n’avait
aucune raison de croire que le modĂšle thĂ©orique n’Ă©tait pas le cadastre du bruit requis par la DĂ©claration gouvernementale puisqu’en dĂ©finitive, votre propre administration y souscrivait.

Personne n’a donc pu remarquer, par exemple, que l’utilisation de la piste 20 chaque dimanche de 6 Ă  17 heures aurait pour consĂ©quence une modification
de l’altitude de vol de 700 Ă  1.700 pieds pour des raisons de sĂ©curitĂ©, de sorte que la commune de Woluwe-Saint-Pierre se retrouvera au plein milieu d’une boucle au temps de passage trĂšs long et donc deviendra plus bruyante
encore. Personne, en d’autres termes, n’a pu contester le cadastre du Ministre Anciaux Ă  dĂ©faut de donnĂ©es contradictoires.

Je n’ai ni l’intention ni les moyens de passer en revue toutes les nouvelles routes et les consĂ©quences qui en dĂ©coulent. Je voudrais seulement insister sur la nĂ©cessitĂ© impĂ©rative de mettre sur pied un excellent rĂ©seau de
sonomĂštres sur le territoire de notre RĂ©gion. Regardez les cartes sur le site du Ministre Anciaux et vous verrez oĂč se trouvent concentrĂ©s les appareils de mesure du bruit.

Il faut bien Ă©videmment que les sonomĂštres bruxellois soient installĂ©s aux bons endroits. Mais comment allons-nous faire car il en faudrait Ă  chaque coin de rue si l’on va vraiment vers une dispersion totale. J’attends
donc impatiemment qu’une politique soit dĂ©finie et appliquĂ©e.

Dans l’immĂ©diat, je me permettrai de vous suggĂ©rer de les installer sous les couloirs aĂ©riens passant par Schaerbeek, Evere (le cimetiĂšre, Helmet et l’OTAN), Woluwe-Saint-Pierre (Avenue de Tervuren et Joli-Bois) et
Woluwe-Saint-Lambert (Shopping et Roodebeek) oĂč les sonomĂštres font cruellement dĂ©faut.

Je suis convaincu que je vous devance de peu avec mon idĂ©e. En effet, je pense que vous savez que l’IBGE est une administration trĂšs compĂ©tente pour tout ce qui concerne l’environnement mais, selon moi, cette
institution ne dispose pas de spécialistes pointus pour ce qui concerne la navigation aérienne. Il faut donc y pourvoir trÚs rapidement et mettre sur pied,
au sein de l’IBGE, une cellule « avions » performante et pourvue de collaborateurs qui s’y connaissent parfaitement en matiĂšre de trafic aĂ©rien si nous ne voulons plus entendre des banalitĂ©s affligeantes qui entĂ©rinent tout bonnement des Ă©tudes universitaires thĂ©oriques.

Mais les mesures de bruit ne suffiront pas. Une fois notre cadastre établi, il faudra que le politique bruxellois ait le courage de le défendre> face au Ministre Anciaux qui ne manquera pas de sortir de son chapeau une nouvelle
mouture de son plan, laquelle ne se distinguera que peu de son premier projet, dĂ©jĂ  entĂ©rinĂ© par l’IBGE. Nous allons assister Ă  une lutte cadastre contre cadastre. Il faudra donc que le nĂŽtre tienne la piste cette fois-ci.

Si nous ne disposons pas d’un outil administratif compĂ©tent et fiable, nous ferons toujours pĂąle figure devant les « experts » du fĂ©dĂ©ral, de la
BIAC et de Belgocontrol.

Je vous rappelle si besoin en est que rien dans les missions de Belgocontrol n’est prĂ©vu pour assurer le respect de normes environnementales au
bénéfice des pauvres « rampants », comme disent les aviateurs quand ils parlent de ceux qui voient et surtout entendent passer les avions.

Si nous voulons amĂ©liorer et rĂ©activer les arrĂȘtĂ©s « bruit » de notre RĂ©gion, il serait temps de s’y atteler. Je constate en tout cas que notre Ministre PrĂ©sident vous presse pour que vous avanciez enfin dans ce dossier.

J’aimerais, Ă  cet Ă©gard, que vous nous disiez oĂč vous en ĂȘtes avec les pĂ©nalitĂ©s qui devraient frapper les nombreux avions de DHL qui sont encore parmi les plus bruyants. Le recours de la BIAC contre vos arrĂȘtĂ©s « bruit » est Ă  ma connaissance toujours pendant et la BIAC n’applique pas non
plus les arrĂȘtĂ©s « bruit » du fĂ©dĂ©ral. Qui fait la loi dans ce pays, BIAC ou les Parlements ? Dans votre confĂ©rence de presse du 11 juin 2003 vous menaciez la Ministre des transports de l’Ă©poque, Madame Onkelinx, de rĂ©activer
les procĂšs-verbaux Ă  l’encontre des contrevenants. Allez-vous maintenant menacer son successeur comme vous vous le promettiez ?

Monsieur le Ministre, vous n’avez plus beaucoup de temps devant vous pour entamer un processus que vous auriez dĂ» enclencher depuis bien longtemps.
Les riverains ont donc raison de se montrer impatients.
Aussi longtemps que nous ne disposerons pas de donnĂ©es honnĂȘtes, vĂ©rifiables et recueillant la confiance de tous, nous continuerons Ă  jouer au ping-pong entre l’Oostrand et le Noordrand. Il nous faut du concret !

Je serais effectivement heureux que notre RĂ©gion puisse apporter sa contribution trĂšs rationnelle Ă  un futur Commissaire du Gouvernement que le Groupe PS accueillerait avec grande satisfaction.

J’espĂšre que ce Commissaire pourra jouer, comme nous l’affirmons depuis des mois, un rĂŽle d’arbitre indĂ©pendant entre les institutions, les administrations, les entreprises et les riverains.

Il reste par ailleurs la question des normes de bruit. Je ne peux pas croire que les nouvelles normes s’aligneront sur celles de l’OMS, lesquelles ne sont que des recommandations et qui, si elles Ă©taient suivies
condamneraient l’aĂ©roport Ă  ne laisser dĂ©coller que des cerfs-volants ou des ULM.

L’important est que nous disposions de normes communes avec la Flandre. Ce serait dĂ©jĂ  un premier pas vers la normalisation des relations interrĂ©gionales.

Devant la perte de lĂ©gitimitĂ© Ă  laquelle nous assistons aujourd’hui, je vous propose de mettre sur pied une commission de contrĂŽle paritaire bruxelloise
composĂ©e de reprĂ©sentants de l’IBGE, des associations de riverains et de parlementaires bruxellois. Cette commission consultative permettrait de regagner la confiance des citoyens et de lĂ©gitimer la dĂ©cision
politique.

Il est en effet crucial que les habitants sous l’emprise des nuisances provoquĂ©es par le trafic aĂ©rien puissent apprĂ©hender parfaitement les mĂ©canismes de mesure qui seront mis en ouvre et en Ă©valuer les rĂ©sultats
périodiques. La population mérite une information vérifiable et aisément compréhensible. Aussi complexes que soient les situations, il paraßt toujours possible de les rendre accessibles au plus grand nombre. Le langage
technocratique utilisé par les experts doit laisser place à un discours intelligible et respectueux du plus grand nombre. Il existe toujours un moyen terme entre obscurité savante et plate démagogie.

Je rĂ©clame aussi que l’ensemble des documents diffusĂ©s par le cabinet du Ministre Anciaux, notamment par le site Internet http://www.spreidingsplan.be/, soient immĂ©diatement disponibles dans les deux langues rĂ©gionales. Aucune urgence ne peut justifier que l’accĂšs
à des documents si importants soit réservé aux seuls néerlandophones, sans parler du jargon en langue anglaise compris uniquement par les professionnels du secteur. Il serait aussi important que les citoyens puissent prendre
connaissance, dans leur langue, des dĂ©cisions judiciaires. Quel est le Ministre qui va enfin se dĂ©cider Ă  les faire traduire en français pour les porter Ă  la connaissance du public ? Je vous suggĂšre Monsieur le Ministre que vous le fassiez via le site de l’IBGE.

Le groupe PS réclame donc que vous preniez un peu plus de hauteur.

Vous avez, emportĂ© par le tourbillon des mĂ©dias, fait beaucoup de dĂ©clarations, Monsieur le Ministre. Ne pensez-vous pas, comme je vous l’ai suggĂ©rĂ© Ă  plusieurs reprises, qu’il est temps que l’on prenne Ă  bras-le-corps tous les aspects pratiques qui doivent rĂ©sulter de notre rĂ©solution du mois de juillet 2003 ?

Je ne viens pas Ă  cette tribune pour gĂ©mir, pleurer ou trĂ©pigner car je ne fais pas partie de l’opposition. Mais ayez au moins le courage d’admettre que nous vous apportons des propositions constructives dont notre
majoritĂ© n’aura qu’Ă  se fĂ©liciter.