Brussels Airport échappe à l’interdiction flamande des vols de nuit

lecho.be
29 mars 2024

Brussels Airport aura un plafond de vols qui correspond à ses prévisions pour 2032. L’impact des vols de nuit devra baisser de 30%. C’est trop peu pour les associations.

Le couperet est tombé. Brussels Airport a son nouveau permis d’environnement. Le cabinet de la ministre de l’Environnement flamande Zuhal Demir a communiqué les grandes lignes de ce nouveau permis après avoir arrêté sa décision vendredi matin.

Les vols à Bruxelles seront plafonnés à 240.000 mouvements d’ici à 2032, ce qui correspond plus ou moins aux prévisions de l’aéroport.

Cependant, l’impact négatif sur le sommeil des vols de nuit sur le sommeil devra être réduit de 30% d’ici à 2032. Actuellement, 16.000 créneaux de vols, dont 5.000 décollages, sont autorisés. Le cabinet Demir compte notamment sur des nuits plus calmes les week-ends pour atteindre cet objectif.

Les décollages, essentiels aux activités de DHL Express, ne seront impactés qu’à partir de 2028.

Zuhal Demir estime avoir fait un bon arbitrage entre les intérêts économiques et la qualité de vie dans la région, particulièrement en préservant les jobs à l’aéroport. « Maintenir l’équilibre entre les intérêts économiques et la qualité de vie est la meilleure garantie de sécurité juridique », déclare la ministre.

La ministre insiste face aux critiques, spécialement celles de l’organisation patronale flamande Voka, sur l’instauration de limites: son autorisation de 240.000 vols représente une augmentation de 13% d’ici à 2032, si on s’en réfère aux chiffres 2023.

Dans le secteur, on prend néanmoins souvent comme référence l’année 2019, avant la pandémie, année pendant laquelle l’aéroport national a enregistré 234.000 mouvements.

« Jusqu’au bout, on pensait que le cabinet tiendrait plus compte du volet santé. Finalement, la ministre n’en a absolument pas tenu compte. »

BERTRAND WAUCQUEZ
BOURGMESTRE DE KRAAINEM ET VICE-PRÉSIDENT DE L’UNION BELGE CONTRE LES NUISANCES AÉRIENNES (UBCNA)

Les riverains vont riposter

Du côté des associations contre les nuisances aériennes, on ne le cache pas: on est très déçu par la décision de Zuhal Demir.

« Nous avons eu beaucoup de concertation avec le cabinet. Jusqu’au bout, on pensait qu’il tiendrait plus compte du volet santé. Finalement, la ministre n’en a absolument pas tenu compte et on habille cela en disant que l’on va limiter les dégâts », répond Bertrand Waucquez, bourgmestre de Kraainem et vice-président de l’Union belge contre les nuisances aériennes (UBCNA).

Les associations sont donc en train de voir quelle serait la meilleure riposte et envisagent notamment des recours. « On ne va pas juste dire amen. On ne fera pas ça dans un esprit de revanche, mais nous avons une occasion unique de changer les choses », ajoute Waucquez.

Il regrette particulièrement l’absence d’étude globale sur les impacts de l’aéroport qui prendrait en compte les aspects économiques, mais aussi les externalités négatives sur la santé par exemple.

Dans la dernière ligne droite, Brussels Airport a en effet sorti une étude détaillant sa contribution de 5,4 milliards d’euros au PNB belge. Cette étude ne calculait pas le coût des effets négatifs de l’activité ou encore la possibilité d’alternatives à certains pans de celle-ci.

Vols de nuit impactés

Les vols de nuit sont le segment dans lequel la donne change le plus pour l’aéroport. Les avions les plus bruyants ne seront plus autorisés à atterrir et décoller durant la nuit à partir de l’été 2025.

À partir de l’été 2026, seuls les avions avec un « quota count » inférieur à 2 – soit un indice de charge sonore très bas – pourront encore atterrir la nuit entre 1h et 5h du matin. Une période qui sera allongée de plusieurs heures en deux étapes, en 2028 et 2030.

Cet aspect surprend du côté du médiateur fédéral de l’aéroport-national, Philippe Touwaide, qui dit « s’étonner que la ministre régionale parle d’agir sur les types d’avions admis de nuit à Bruxelles-National, en confondant, elle aussi, les normes de bruit au sol (compétence régionale) avec les niveaux individuels de bruit des avions (compétence fédérale): agir sur les types d’avion dépend du Fédéral uniquement« .

Le médiateur critique au passage un permis qui donne la priorité à l’économie sur les autres aspects comme la santé.

Selon la communication du cabinet Demir, les décollages, essentiels aux activités de DHL Express, ne seront impactés qu’à partir de 2028.

« Si l’on diminue le nombre de slots de nuit, cela aura une conséquence très négative sur l’activité économique. »

ARNAUD FEIST
CEO DE BRUSSELS AIRPORT COMPANY

« Carcan viable »

L’aéroport va maintenant prendre le temps de bien analyser ce nouveau permis d’environnement avant de le commenter. « Si l’on diminue le nombre de slots de nuit, cela aura une conséquence très négative sur l’activité économique », prévenait le CEO de l’aéroport Arnaud Feist en mai dernier. Cette activité de nuit à l’aéroport représente 14.000 emplois directs et indirects.

DHL a déjà réagi dans la foulée que si ces nouvelles conditions imposaient un nouveau carcan à DHL Express, elles semblaient viables. « La clarté qui était nécessaire est maintenant là. La clarté d’un cadre à long terme permet d’étudier, de planifier et de mettre en œuvre de nouveaux investissements, y compris en termes de durabilité de nos opérations. La confiance est maintenant revenue« , indique Lorenzo Van de Pol, porte-parole de DHL Aviation.

L’Open Vld mécontent des conditions du nouveau permis

Les libéraux flamands critiquent vivement le permis environnemental accordé par la ministre Demir à l’aéroport de Bruxelles, craignant que les conditions imposées ne limitent sa croissance à long terme. Le Premier ministre Alexander De Croo souligne ainsi l’importance de l’aéroport pour l’économie belge et remet en question les priorités de la N-VA.

L’une des principales préoccupations des libéraux concerne le plafonnement du nombre de vols autorisés à l’aéroport de Bruxelles. De Croo souligne l’incertitude quant à l’impact de cette restriction sur la croissance de l’aéroport, proposant plutôt des normes de bruit pour encourager l’utilisation d’avions moins bruyants.

De son côté, le président de l’Open Vld, Tom Ongena, critique également le permis, accusant la ministre Demir de mettre en danger un important pôle économique. Les conditions d’exploitation jugées trop restrictives par les libéraux sont qualifiées d’instrument électoral par la ministre flamande de l’Environnement.