Le plaidoyer manipulateur et de mauvaise foi du patron de l’IATA

Lecho.be
12/12/2019

Commentaire reçu : Avec le patron de l’IATA on est assurĂ© d’avoir un plaidoyer pro domo peaufinĂ©e par les dĂ©fenseurs du trafic aĂ©rien qui ne sont pas Ă  une inexactitude prĂšs.

Alexandre de Juniac (Iata) « L’aviation est une cible car c’est un transport emblĂ©matique »

Lors de la deuxiĂšme journĂ©e sur l’ »état de l’union » de l’Association du transport aĂ©rien international (Iata, qui compte 290 compagnies), jeudi Ă  son siĂšge de GenĂšve, l’accent a Ă©tĂ© clairement mis sur toutes les questions relatives Ă  l’environnement. Le secteur du transport aĂ©rien a beau ne reprĂ©senter que 2% des Ă©missions mondiales de CO2 et rĂ©aliser des progrĂšs constants grĂące aux progrĂšs de la technique, il n’en reste pas moins une cible privilĂ©giĂ©e de comitĂ©s environnementaux de tous poil. Nous avons pu demander au directeur gĂ©nĂ©ral de l’Iata, Alexandre de Juniac, son sentiment.

« Nous sommes une cible parce que l’aviation est un transport emblĂ©matique, observe-t-il. Au dĂ©but de l’annĂ©e, je suis allĂ© en Finlande et j’ai constatĂ© qu’il y avait des campagnes publiques contre ceux qui se rendaient en ThaĂŻlande. Quelque temps plus tard, je suis allĂ© dĂ©fendre mon industrie devant les dĂ©putĂ©s suĂ©dois et j’ai Ă©tĂ© sidĂ©rĂ© par leur ignorance de l’aĂ©rien. Je crois donc qu’il est plus qu’urgent de fournir des explications claires et prĂ©cises sur ce que nous faisons pour l’environnement et quel est notre impact rĂ©el. »

Unification du ciel

De Juniac s’est fixĂ© deux objectifs prĂ©cis pour 2020: s’exprimer « le plus rapidement possible » sur ce dossier environnement et enjoindre la nouvelle Commission europĂ©enne Ă  accĂ©lĂ©rer le processus d’unification du ciel europĂ©en: « Avec les accords qu’ont signĂ©s en Belgique skeyes et les militaires, vous avez clairement montrĂ© la voie Ă  suivre. Parmi les arguments que nous ferons valoir, il y aura justement l’aspect Ă©cologique – c’est bien notre tour! – car les couloirs aĂ©riens nous font consommer plus de 15% de carburant supplĂ©mentaire. »

« Notre slogan, c’est ‘voler plus et polluer moins’. »

Alexandre de Juniac
directeur gĂ©nĂ©ral de l’IATA

Au fil du temps, l’association a fort Ă©voluĂ©, des seules compagnies « rĂ©guliĂšres » aux charters et low costs, puisqu’aujourd’hui des compagnies comme Indigo Air ou Lion Air en font partie: « Et si EasyJet, Ryanair ou Southern en faisaient la demande, elles seraient reçues Ă  bras ouverts », insiste de Juniac.

Et Ă  ce propos, leurs tarifs sont-ils trop bon marchĂ©? « Il ne faut pas augmenter d’autoritĂ© les tarifs car tout le monde a le droit de voler. Notre slogan, c’est ‘voler plus et polluer moins’ ». Depuis 1990, l’empreinte carbone par passager a Ă©tĂ© diminuĂ©e par deux et l’objectif du programme « Corsia » (Carbon offsetting & reduction scheme for international aviation) de l’OACI est de favoriser une croissance de trafic sans augmentation d’émissions de CO2.

Liberté de voler

Le mĂȘme programme Corsia prĂ©voit aussi des compensations concrĂštes en matiĂšre d’environnement (en plus des recherches pour des carburants alternatifs) Ă  hauteur de 40 milliards de dollars par an. C’est toujours plus constructif que les nouvelles taxes sur l’aĂ©rien imposĂ©es en France, en Allemagne, aux Pays-Bas et en Suisse.

Imposer comme en Suisse les fonctionnaires Ă  prendre le train pour des trajets de huit heures paraĂźt, pour le CEO de l’Iata, incongru: « Mais que l’on laisse les voyageurs choisir! Comment prĂ©tendre que le train est moins polluant que l’avion? MĂȘme sans tenir compte des infrastructures, il faut des usines Ă  charbon pour produire de l’électricitĂ© ou, comme en France, des centrales nuclĂ©aires, mais ça, les lobbys ne le disent pas. »

Est-ce Ă  dire que la prochaine « clarification » de l’Iata attaquera d’autres secteurs plus polluants que l’aĂ©rien? « Non, nous ne serons pas agressifs, affirme de Juniac; notre premier souci sera de prĂ©senter des faits et de rĂ©tablir la vĂ©ritĂ©. »

Et aprĂšs ces deux objectifs majeurs (ciel unique et environnement), quel sera le prochain dĂ©fi de l’Iata? « AprĂšs, je pense qu’on devra s’attaquer aux capacitĂ©s aĂ©roportuaires », conclut Alexandre de Juniac.

Patrick ANSPACH