Un article de 2003, un avertissement qui garde tout son sens

Notre commentaire : Toute personne prônant le survol de zones dangereuses s’exposera à des poursuites de la part des riverains et familles de victimes en cas d’accident aérien ; faute d’avoir respecté les avertissements des associations de riverains. Que tout le monde en soit parfaitement informé.

lalibre.be
6 mai 2003

Vols de nuit: «évitons de tenter le diable»

PHILIPPE LAWSON

Malgré la retouche du tracé, le site Seveso de Shell est un site dangereux à éviter.
En cas de crash d’avion, une boule de feu détruira tout dans un rayon de 800 mètres.
Les plans catastrophes n’empêchent pas les accidents. Ils en limitent les effets.

ENTRETIEN

Ingénieur civil de son état, le major Jean-Claude Quertinmont est responsable des opérations des pompiers de Bruxelles. La problématique des mouvements d’avions au départ de l’aéroport de Bruxelles-National et les risques liés au survol de sites Seveso ne lui sont pas inconnus. Au contraire, il en connaît les différentes facettes et son analyse de la nouvelle trajectoire n’est pas plus rassurante. «Chaque fois qu’un avion est en difficulté à Zaventem, nous envoyons des équipes d’intervention. Nous faisons entre 25 et 30 sorties de ce genre par an et le nombre est en augmentation», dit-il.

La nouvelle trajectoire résout-elle le problème de sécurité lié au survol des sites Seveso?

Bien sûr que non. Les parties d’un appareil en perdition ne vont pas suivre la trajectoire tracée. L’important est de ne pas voler à proximité des zones dangereuses comme les sites Seveso, surtout proches des habitats. Il est donc insensé de parler d’écart de 100, voire de 500 mètres entre la trajectoire et le site Seveso de Shell à Neder-Over-Hembeek comme solution de moindre mal ou pour parer à tout risque.

Quels sont donc les risques liés au survol d’un site Seveso?

Du point de vue statistique, le crash d’un avion sur un site Seveso est rare. Mais quand il arrive, c’est un accident grave aux conséquences mortelles sans précédent. On assiste à une rupture des canalisations et de stock de gaz suivie d’explosion massive avec une boule de feu dans un rayon d’environ 800 m. C’est ce qu’on appelle le phénomène «BLEVE» (Bowling Liquid Evaporating Vapors Explosion). Imaginez les dégâts dans le cas du dépôt de Shell.

Combien de sites Seveso recense-t-on en Belgique notamment à Bruxelles?

Selon la législation notamment européenne qui les a classés en grands et petits Seveso, on dénombre plus de 130 sites en Belgique dont 9 à Bruxelles. Ces derniers sont tous situés le long du canal et presque perpendiculairement au nouveau couloir aérien. Le site Shell est un grand Seveso.

Y a-t-il une réglementation qui régit le survol des sites Seveso?

En principe non, sauf l’interdiction de survol des centrales nucléaires. Mais si on veut privilégier la sécurité, il est grand temps que les politiques prennent des mesures pour interdire le survol ou le passage à proximité des sites Seveso. Il faut arrêter de tenter le diable.

Et du survol des zones d’habitat?

C’est la même situation que le survol des sites Seveso. Des législations nationales interdisent certains survols comme celui du château royal de Laeken. Mais les techniciens prônent depuis belle lurette le non survol des zones peuplées, car les accidents d’avions ont toujours des conséquences humaines désastreuses. Certaines villes comme Munich ont interdit le survol des zones peuplées, d’autres comme Londres (Heathrow) le tolère parce qu’elles n’ont pas le choix. Selon les statistiques de l’Association du transport aérien international (Iata), la majorité des accidents intervient dans une zone de 5 km avant l’atterrissage et 5 km après l’atterrissage. On n’a pas toujours pesé le pour et le contre en matière de sécurité.

Que dire des plans catastrophes à Bruxelles?

Le seul plan catastrophe finalisé est justement celui concernant le site Seveso de Shell. C’est le résultat d’une année de travail. Il va très loin et propose, en cas de catastrophe, l’évacuation des populations avec l’aide des transports en commun. Un second plan est prêt et il concerne l’arrondissement administratif de la Région de Bruxelles-Capitale. Mais les plans catastrophes ne sont là que pour limiter les effets et les conséquences des dégâts et définir les rôles de chaque service de secours.

© La Libre Belgique 2003