Les compagnies aériennes se moquent des amendes

Elles refusent de payer 11 millions d’euros pour 76.205 vols trop bruyants
La Dernière Heure
Gilbert Dupont

ANDERLECHT Les compagnies aériennes bruyantes opérant à Brussels Airport se moquent des amendes administratives de l’IBGE infligées à chaque fois qu’un vol trop bruyant est constaté.

En 2011, 128 des 401 amendes – soit 32 % – infligées depuis le 1er janvier 2000 sont restées impayées et les compagnies aériennes en infraction n’ont payé que 5,2 % des montants qu’elles devaient, refusant de payer 94,8 % de ces montants.

L’impayé a atteint un record en 2010 : selon nos infos toujours, 99,88 % des amendes infligées en 2010 n’ont pas été payées par les compagnies aériennes, lesquelles ont payé en tout et pour tout 1.615 euros, 0,12 % de ce qu’elles devaient.

Entre janvier 2007 et le 1er septembre 2011, 59.327 avions ont décollé de nuit de Brussels Airport et ces vols ont donné lieu à la constatation de 18.646 infractions : un avion sur trois. Le système d’amendes mis en place pour forcer les compagnies à un effort est peu efficace, comme le prouve la somme astronomique que les compagnies casse-oreilles refusent de payer : 10.999.283 euros.

Depuis le 1er janvier 2000, 76.205 vols en infraction pour dépassement sonore ont été constatés sur Bruxelles. La tolérance est grande : 75,3 % (ou trois vols trop bruyants sur quatre) sont passés à la trappe, à peine 24,7 % ont donné lieu à un P-V de sanction. En dix ans, l’IBGE a infligé 18.858 P-V pour dépassement sonore et 57.347 simples avertissements.

Excellente nouvelle cependant car, sur le long terme, l’évolution est nettement favorable : constamment en hausse jusqu’en 2007 qui fut l’année record avec 12.415 dépassements constatés (34 par jour), le nombre des vols bruyants a reculé de plus d’un tiers en cinq ans : 38,8 % depuis 2007.

Le sommeil des Bruxellois serait ainsi de 38,8 % plus paisible. Pour le mesurer, l’IBGE, qui cherche à appliquer au mieux la réglementation de mai 1999, dispose à présent de 8 stations permanentes de mesure.

En principe, les vols en infraction de 6 décibels maximum donnent lieu à un simple avertissement. Malgré cette tolérance, les compagnies ont pour politique de contester.

Ainsi, European Air Transport est en recours depuis 2008 devant le Conseil d’État pour 48 infractions sanctionnées par 56.113 euros d’amendes administratives… qu’EAT refuse de payer. Et le procès qui dure depuis 4 ans est loin d’être terminé.

Les puissantes compagnies contestent au total 154 décisions, pour au moins 7.009.272 euros d’amendes. Des compagnies comme DHL contestent depuis 13 ans la légalité de la réglementation bruxelloise contre le bruit généré par le trafic aérien, l’estimant notamment contraire aux principes communautaires européens de liberté d’exploitation.

Elles contestent aussi sa rigueur, la lourdeur des amendes administratives… 90 fois supérieures aux amendes pénales prévues pour le même motif.

Toutes les compagnies préféreraient être sanctionnées par le parquet de Bruxelles – dérisoire, l’amende minimale serait alors de… 1,50 euro par vol bruyant ! – que par l’IBGE – qui peut grimper de 625 à 62.500 euros par vol bruyant constaté; en pratique, le tarif appliqué est de 758 euros (pour un dépassement de 6 décibels) et 1.245 (dépassement de 16 décibels)… que les compagnies ne paient quand même pas : une seule amende de 1.615 euros fut payée en 2010.

Soit 0,12 % et donc 99,88 % de refus de payer pour un total record qui atteint 11 millions d’euros à la date du 1er septembre 2011.