Rétroactes :
L’arrêté royal « octroyant la licence d’exploitation de l’aéroport de Bruxelles-National à la société anonyme BIAC » se base sur l’article 158 de la loi-programme de décembre 2001. Cet article stipule que « le Roi peut
(…) soumettre l’exploitation de [l’aéroport de Bruxelles-National] à l’octroi d’une licence d’exploitation individuelle et assortir cette licence de conditions d’exploitation visant à sauvegarder l’intérêt général.
La licence d’exploitation, c’est donc le document (prenant la forme d’un arrêté royal) censé définir les objectifs et obligations imposées par l’Etat à la BIAC une fois l’exploitant de l’aéroport fédéral privatisé, ce qui
pourrait être le cas avant la fin de cette année.
Le projet d’arrêté royal (de licence d’exploitation) que le Gouvernement a décidé d’envoyer au Conseil d’Etat dès le 21 novembre 2003 et qu’il a approuvé définitivement (après des amendements mineurs) lors du Conseil des Ministres du 14 mai 2004 est essentiellement identique au projet qui avait
été concocté sous la législature arc-en-ciel, par le Ministre des Entreprises publiques de l’époque, le VLD Rik Daems et sur lequel aucun accord n’était encore intervenu.
Contrairement à ce qu’ont déclaré les Vice-Premiers Onkelinx et Michel sur les antennes de la RTBf et de RTL-Tvi, il n’a jamais été question, en la matière, d’un projet émanant de Madame Durant ou de son Cabinet. Et pour
cause, dès lors qu’il s’agissait de la privatisation d’un dossier relevant du Ministre Daems. Ce qui est certain, par contre, c’est que, sous la précédente législature, le Cabinet Durant a déposé un grand nombre d’amendements par rapport au texte déjà très faible élaboré par le Ministre
Daems.
Il n’est peut-être pas inutile de rappeler que s’il est aujourd’hui possible de retirer la licence d’exploitation à la BIAC, en cas de manquement grave à ses obligations, c’est grâce à Ecolo. Le Cabinet Durant avait également
exigé à l’époque, d’une part, que le projet soit couplé à la mise en place d’un régulateur indépendant, et d’autre part, que soit mis en place par un avant-projet de loi adapté, un dispositif de contrôle et de sanction digne
de ce nom.
Le projet d’arrêté royal que viennent d’approuver le Gouvernement socialiste-libéral est donc en réalité un projet VLD qui fut longtemps bloqué par les Ecologistes. Le texte en question a fait l’objet d’une délibération en Conseil des Ministres le 21 novembre 2003 et d’un avis en
bonne et due forme du Conseil d’Etat en date du 14 janvier 2004.
Développements récents :
Le 5 mai 2004 très exactement, l’actuel Ministre des Entreprises publiques, le SP-A Vande Lanotte, parle encore à ce sujet, en réponse à une question de la députée Ecolo Marie Nagy, d’un « arrêté royal actuellement en préparation ». Mais en dépit des questions précises de la députée écologiste, il ne disait rien sur son contenu réel, ni sur le fait qu’il avait été approuvé et envoyé au Conseil d’Etat.
Quelques jours plus tard, le Conseil des Ministres du 14 mai approuve, en deuxième lecture, le projet d’arrêté royal octroyant une licence d’exploitation à l’exploitant de l’aéroport de Bruxelles-National. Malgré l’importance capitale de ce texte et le débat qui fait rage dans l’opinion sur les questions touchant à l’équilibre entre économie et environnement à Bruxelles-National, le Conseil des Ministres n’a diffusé aucun communiqué au sujet de cette décision à la presse à l’issue de ce Conseil. Il n’est donc pas exact de dire que cela a été pris en toute transparence. De là à conclure que le Gouvernement a ignoré le Parlement et gardé son projet sous le manteau pendant tout ce temps pour éviter, une fois de plus, de devoir rendre des comptes avant les élections sur ses options politiques en la matière, il n’y a évidemment qu’un pas.
L’analyse d’Ecolo :
Cela fait des mois que les parlementaires verts essayent d’obtenir des Ministres Anciaux et Vande Lanotte un minimum de réponses et d’assurances quant aux mesures prises ou envisagées pour limiter les nuisances engendrées par l’aéroport de Bruxelles-National; des mois que les réponses vagues voire contradictoires des Ministres « compétents » renvoient à la future licence d’exploitation de BIAC…
Pour Ecolo, ce document primordial aurait dû être le dernier rempart fédéral face au développement sauvage du trafic et des nuisances de l’aéroport de Zaventem. Plutôt qu’un rempart, c’est un appel sans équivoque à une
expansion illimitée de celui-ci.
La licence d’exploitation envisagée renvoie certes aux normes acoustiques arrêtées par les régions, qui sont compétentes en la matière, et elle ne remet pas explicitement en question le plafonnement du nombre de vols de nuit actuellement imposé par le Région flamande. Mais en quoi cela dispense-t-il le niveau fédéral de prendre ses responsabilités en la matière ? « Si au lendemain des élections régionales, le ministre flamand de l’Environnement n’est plus un vert », il y de fortes chances que le plafond actuel de 25.000 mouvements sera supprimé par son successeur pour répondre aux demandes de DHL.
Pour Ecolo, le but de la manoeuvre est bien, d’abord et avant tout, de développer l’aéroport pour répondre à la demande, une demande qui, comme chacun sait, est dopée artificiellement par l’absence de tout prélèvement fiscal sur le transport aérien. Plutôt que de saisir cette opportunité pour baliser et encadrer l’expansion d’un des aéroports les plus mal situés d’Europe des points de vue sécurité et santé, le Gouvernement ne trouve rien
de mieux à faire que de reprendre les objectifs de capacité minimale (80 mouvements coordonnés par heure) hérités des contrats de gestion des années 90.
Après un an d’une politique totalement axée sur la dispersion maximale des nuisances, à l’exclusion de toute mesure de réduction de celles-ci, la grande absente du projet de licence d’exploitation du Gouvernement socialiste-libéral est la dimension environnementale.
En dépit de toutes leurs promesses de nouveaux quotas de bruit (plus contraignants?), d’activation d’un programme de rachat et d’insonorisation adapté, de continuation de l’effort de modernisation de la flotte de nuit, de mise en place d’une autorité de contrôle indépendante, etc., aucune
nouvelle obligation n’est imposée à BIAC en matière de respect de la santé et de l’environnement.
Le principe de base énoncé dans la licence se borne à demander à BIAC de se « conformer aux normes et usages nationaux et internationaux et comparables à celles des aéroports de référence ». Cette démission flagrante du
Gouvernement est d’autant plus déplorable que celui-ci devrait savoir que, même en matière de nuisances sonores, il n’existe plus véritablement de normes internationales contraignantes mais bien un vague socle minimum, totalement inadapté aux réalités belges et européennes. La matière est
d’ailleurs régie depuis 2002 par une directive européenne (la directive 2002/30, que la Belgique n’a pas encore transposée) qui préconise précisément une approche aéroport par aéroport!
Mais il est vrai que l’arrêté royal concocté par le Gouvernement ne consacre même pas le moindre attendu aux directives européennes pertinentes …
Isabelle Durant, Sénatrice
Maison des Parlementaires
Rue de Louvain, 21
1009 Bruxelles
Tél. : 02/549 90 59
Fax : 02/549 87 98
http://www.isabelledurant.be
à consulter :
[Licence de BIAC : ce que vous n’auriez pas dû lire->http://www.ecolo.be/index.php?class=info&page=dossiers/2004_survolbxl4&menu=dossiers/2004_survolbxl]