DHL dĂ©truit l’emploi!?

L’intĂ©rĂȘt public (soit permettre de crĂ©er des emplois) doit passer avant l’intĂ©rĂȘt privĂ© (que les riverains puissent dormir tranquillement) mais…

«Il y a juste un hic: DHL ne crĂ©e aucun emploi. Ou plutĂŽt: pour chaque emploi qu’il crĂ©e, il y a un emploi dĂ©truit ailleurs. Car les colis transportĂ©s par DHL, on peut supposer qu’ils doivent ĂȘtre transportĂ©s de toute façon. Le dĂ©veloppement du transport aĂ©rien de nuit n’a fait que dĂ©placer du jour vers la nuit tout un pan de l’activitĂ© Ă©conomique, sans crĂ©er une once de valeur ajoutĂ©e. Le seul avantage du transport de nuit, c’est qu’un colis postĂ© Ă  la fermeture des entreprises, soit Ă  17h, est livrĂ© au destinataire le lendemain Ă  9h. Sans DHL, il serait arrivĂ© Ă  14 ou 15h. Catastrophe manifeste dans une optique du «just in time», oĂč chaque seconde compte et oĂč le capital investi doit tourner sans jamais s’arrĂȘter, au mĂ©pris de toute autre considĂ©ration. Mais est-ce le seul critĂšre Ă  retenir? (…)

En tout cas, cet impĂ©ratif n’a plus grand-chose Ă  voir avec une production de biens et services socialement utiles (…). Qu’on supprime donc DHL, TNT et consorts, et qu’on interdise totalement les vols de nuit. Les taux de profit du secteur passeront peut-ĂȘtre de 7,3 Ă  6,9% et les fonds de pensions amĂ©ricains vont rĂąler. Mais en 48h, les emplois perdus la nuit, qui de surcroĂźt ne sont pas dĂ©localisables, seront recrĂ©Ă©s le jour. Les travailleurs retrouveront, avec des horaires «normaux», les joies d’une vie sociale et familiale plus harmonieuse tandis que les riverains dormiront plus tranquille. Je sais: utopie Ă©colo-gauchiste? J’oubliais dans quelle Europe nous vivons.»

De Henri GOLDMAN,

rédacteur en chef de la revue de débats «Politique»,
avril 2004, n°34.

© La Libre Belgique 2004