Antwoord van ECOLO

1. Un aéroport spécialisé dans le transport de passagers. Délestage des autres fonctions vers d’autres aéroports mieux situés
Bruxelles-National a atteint son niveau de saturation environnementale. On ne peut donc pas le laisser continuer indéfiniment à accueillir tous les types de trafic, sans limite de volume et de nuisance. Cela est d’autant plus vrai que le transport aérien jouit de toutes sortes d’avantages fiscaux qui le rendent artificiellement attractif par rapport à ses concurrents moins polluants.

Il convient de dresser un bilan socio-économique sans complaisance des différents types de trafic actuellement accueillis à Bruxelles-National. Certaines activités génèrent manifestement des coûts très élevés que ne semblent pas compenser leurs bénéfices pour la société. Pour Ecolo, il est clair depuis très longtemps déjà que c’est typiquement le cas des vols de nuit, qu’ils transportent du courrier express, des colis ou des passagers (charters).

Cela n’implique toutefois pas qu’il faille interdire toute forme de transport de fret et laisser le trafic passager se développer sans contraintes pendant la journée. Fermer cet aéroport la nuit implique certes la disparition du fret express (sauf en cas d’interdiction à l’échelle européenne). Il n’y a par contre pas de raison d’interdire les vols mixtes (passagers + cargo), voire d’exclure que Zaventem puisse accueillir un mixte d’avions passagers et d’avions cargo de taille raisonnable (plus les énormes quadriréacteurs qui lorsqu’ils se dirigent vers la balise d’Huldenbergh, sont amenés à décoller en ligne droite au-dessus de la Capitale jusqu’à une altitude de 4.000 pieds).

La responsabilité du Gouvernement est de protéger la population en plafonnant strictement les quantités de trafic et de nuisances autorisées et en facturant aux opérateurs l’ensemble des coûts que leurs activités engendrent. Cela devrait concerner les vols passagers, qui, de la même manière qu’un certain nombre de vols cargo, pourraient être en partie remplacés par une utilisation plus intensive du train conventionnel ou à grande vitesse.

2. Priorité aux destinations européennes de point à point distantes de plus de 600 km. Une taxation dissuasive sera appliquée aux autres destinations

Entièrement d’accord sur ces principes, avec une nuance quant à la méthode utilisée en ce qui concerne le critère de distance. L’aéroport de Bruxelles-National est trop mal situé pour qu’on puisse s’offrir le luxe d’y concentrer un important trafic de transfert comme ce fut longtemps le cas à l’époque de la SABENA. Il faut effectivement se concentrer sur le marché des déplacements de et vers la Belgique et privilégier le trafic point à point.

L’aéroport de Bruxelles-National peut parfaitement prospérer et jouer son rôle de porte d’accès de la Capitale de l’Europe sans pour cela devoir accueillir en plus des millions de passagers qui n’ont pas Bruxelles ou la Belgique comme origine ou comme destination. La première mesure à prendre serait donc de revoir la tarification en vigueur de manière à supprimer les tarifs préférentiels dont jouissent actuellement les passagers en transfert.

D’accord pour décourager l’utilisation de l’avion sur les distances où d’autres modes de transport pourraient parfaitement être compétitifs. Il ne faut cependant pas pour autant prendre comme critère une distance fixe en kilomètres. En effet, certaines destinations plus lointaines sont parfaitement accessibles en train à grande vitesse tandis que d’autres, plus proches, ne le sont pas. En veillant enfin à ce que les coûts environnementaux du transport aérien soient pris en compte, on pourrait arriver au même résultat, sans risquer d’être accusé de discrimination. En effet, comme les avions consomment beaucoup plus de kérosène pendant les phases de décollage que pendant leur « croisière », le simple fait d’imposer le kérosène comme n’importe quel carburant et/ou de facturer les émissions polluantes des avions aurait pour effet de pénaliser davantage les vols les plus courts et d’encourager le remplacement de ceux-ci par les alternatives disponibles.

3. Fermeture de l’aéroport de 23 heures à 7 heures du matin afin de garantir une nuit réparatrice aux riverains – sauf urgence humanitaire ou technique.

Avec un aéroport aussi proche de l’agglomération qu’il désert que Bruxelles-National, la meilleure manière de garantir le sommeil des habitants de cette agglomération est d’imposer aux avions un couvre-feu de huit heures.

En gérant correctement les flux de départ et d’arrivée, il serait possible de garantir 8 heures de sommeil à tous les riverains tout en ne fermant complètement l’aéroport la nuit que pendant 7 heures au total. Il suffirait pour cela d’interdire tout atterrissage entre 23h30 et 7h30 et tout décollage entre 22h30 et 6h30. C’est la proposition qu’Ecolo avait soumise au Gouvernement wallon lorsque celui-ci s’est penché tout récemment sur le cas de Gosselies. Le MR et le PS ont cependant préféré raccourcir davantage la plage de couvre-feu aux dépens des riverains de cet aéroport pourtant censé être fermé la nuit.

4. Liaison rapide avec la gare TGV de Bruxelles-Midi équipée pour l’enregistrement et l’acheminement des bagages (check-in)

Favoriser l’utilisation du train à grande vitesse ne veut effectivement pas dire qu’il faille amener le TGV lui-même dans tous les aéroports. Si on veut que le TGV soit aussi souvent que possible compétitif par rapport à l’avion, en termes de temps de parcours porte à porte, il est beaucoup plus intéressant, dans la majorité des cas, de ne pas lui imposer de détour par les aéroports mais bien au contraire de l’amener le plus directement possible au cœur des grandes villes. Les TGV ne devraient être détournés vers un aéroport que si celui-ci a réellement pour vocation de centraliser un trafic intracontinental important dans la perspective de vols intercontinentaux, ce qui ne devrait pas être le cas de Zaventem.

Mais les aéroports génèrent également d’importances nuisances et énormément de congestion « au sol ». En favorisant l’enregistrement des bagages dans les grandes gares, qu’il s’agisse de la Gare du Midi ou d’une autre, en organisant le transport des voyageurs vers Bruxelles-National et en transports publics plutôt qu’en voiture, on pourrait réduire considérablement la quantité de pollution que l’aéroport fédéral génère au sol.

5. Interdiction de survol de TOUTE zone densément peuplée à moins de 2.000 mètres d’altitude. C’est la règle d’application à l’intérieur du périphérique parisien, à la fois pour des raisons de sécurité et de santé publique.

Une règle similaire existe en réalité pour Bruxelles-National, avec des nuances permettant de tenir compte des spécificités de sa localisation. Ainsi que l’a très bien indiqué l’étude commandée par Ecolo au bureau d’avocats Huglo-Lepage et Associés, le plan de dispersion de l’actuel Gouvernement est à cette égard, en totale contradiction avec notre Code de l’Air, c’est-à-dire avec la Loi.

Comme dans l’écrasante majorité des aéroports analysés dans la même étude, la détermination des routes de départ de Bruxelles-National devrait limiter au maximum le survol à basse altitude des zones les plus densément peuplées.

6. Politique d’aménagement du territoire destinée à RETABLIR des couloirs non habités et à maintenir les zones agricoles et industrielles. Indemnisation des personnes les plus exposées, qui doivent pouvoir s’installer ailleurs sans frais. Refus de tout permis de bâtir résidentiel, sous ces couloirs aériens prioritaires obligatoires (sauf météo exceptionnelle).

L’étude de trente aéroports européens majeurs ou urbains commandée récemment par Ecolo le montre clairement : Une écrasante majorité d’entre eux font l’objet de politiques bien plus volontaristes que Bruxelles en matière :

-* d’évitement du survol des zones les plus densément peuplées ;
-* de plans d’aménagement tenant compte des niveaux de bruit auxquels sont exposées les zones riveraines ;
-* et, bien sûr, de programmes de rachat et d’insonorisation des maisons par trop exposées aux nuisances des avions.

En 2002, le Gouvernement flamand, qui est compétent pour l’aménagement des zones les plus proches de l’aéroport, s’était engagé à prendre ce problème à bras le corps. A notre connaissance, il n’en a toujours rien fait.

Il est facile de comprendre que la politique de dispersion totale des vols et des nuisances voulue par le Gouvernement actuel est incompatible avec la mise en œuvre d’un programme de rachat et d’insonorisation performant. Un tel programme n’a de sens que si on limite au maximum le nombre de maisons exposées au bruit.

7. Recul des seuils de piste et augmentation des gradients de montée. Ces deux mesures combinées doivent contribuer à limiter le nombre de personnes survolées.

Lorsqu’on exploite un aéroport dont le principal défaut est d’avoir les pistes de décollage pointées vers les quartiers densément peuplés d’une grande agglomération, la moindre des choses, c’est de ne pas aggraver encore cette situation en laissant les avions « gaspiller » plusieurs centaines de mètres de piste lors de leurs décollages ou en les autorisant à décoller avec des angles de montée inutilement faibles.

Ces deux principes simples ont été avancés pour la première fois au sujet de Bruxelles-National lors de travaux du Groupe PROBRU en 2001 et 2002. Les experts français et hollandais engagés par Isabelle Durant dans la cadre de la révision des procédures de décollage de Zaventem ont ensuite confirmé l’importance de ces aspects et les procédures élaborées par le consultant AAC, que ce Gouvernement s’est empressé de mettre à la poubelle, en tenaient pleinement compte.

Les gradients de montées viennent cependant malgré tout d’être revus à la hausse. A l’inverse et en dépit des promesses du Gouvernement à cet égard, la deuxième mesure n’a finalement été mise en œuvre que pour les vols de nuit. Comme il fallait s’y attendre, les opérateurs n’ont pu se résoudre à la généraliser car n’utiliser la piste de décollage principale que sur une partie de sa longueur leur permet de gagner du temps lorsque le trafic est plus important.

8. Modification de la licence d’exploitation de BIAC avant cession des parts de l’Etat au secteur privé. L’Etat renforce les contraintes environnementales et supprime l’obligation faite à BIAC de garantir un rythme de 80 mouvements d’avions à l’heure, afin que l’aéroport reste supportable pour ses riverains.

Supprimer l’obligation de capacité minimale (de 80 mouvements par heure) ne suffira pas. Il devient urgent de préciser les limites de trafic à ne pas dépasser par l’aéroport. De telles limites devraient tenir compte des nuisances réellement générées de manière à ce que les opérateurs aient un réel incitant à intégrer l’environnement dans leurs choix de gestion.

9. Création d’une autorité indépendante chargée du respect des procédures. Cette autorité constatera et verbalisera de manière dissuasive les infractions constatées, elle fournira aussi les cartes et les chiffres demandés par le médiateur pour l’aéroport.

Il a fallu un acharnement inouï, sous la législature précédente, pour faire accepter par les partis traditionnels, le principe d’un Service de Médiation véritablement indépendant. Certains, et pas uniquement des représentants de BIAC, ont d’ailleurs tout fait pour limiter ses prérogatives et ses moyens d’actions.

La création d’une véritable autorité de contrôle, investie d’un pouvoir de sanction des infractions, est tout aussi indispensable et devrait d’ailleurs être un préalable incontournable à la privatisation.

Le médiateur de l’aéroport, tout comme cette autorité, devraient bénéficier d’un accès très large à toutes les informations relatives au trafic aérien. Les obligations des opérateurs en la matière devraient leur être entendues par l’inscription de nouvelles obligations dans le contrat de gestion de Belgocontrol et dans la licence d’exploitation de BIAC. Cela aussi devrait être un préalable à sa privatisation.

10. Augmentation des redevances d’atterrissage. L’augmentation du montant des redevances, sur cette plateforme, incontournable pour l’Europe, garantira sa rentabilité, malgré la diminution du nombre de mouvements liés à sa spécialisation.

Les redevances d’utilisation de l’aéroport de Bruxelles-National devraient effectivement être majorées. En pratique, il suffirait pour cela de veiller à ce que les redevances payées par les compagnies aériennes intègrent les coûts environnementaux générés par l’aéroport et par le transport aérien en général.
En tenant compte, dans le calcul de ces redevances, du principe du pollueur/payeur, on encouragerait une utilisation plus responsable et plus parcimonieuse de ce mode de transport particulièrement polluant. C’est le seul moyen d’éviter l’explosion du trafic que tous les spécialistes nous prédisent et que les grands bénéficiaires de cette activité appellent de leurs vœux.

Plutôt que de verser le produit de ces augmentations à BIAC qui, contrairement à ce que d’aucuns pourraient croire, ne connaît pas de véritable problème de rentabilité, mieux vaudrait utiliser les moyens supplémentaires ainsi dégagés pour financer les mesures d’accompagnement qui font aujourd’hui cruellement défaut et/ou pour financer le développement d’alternatives au transport aérien.

Plus généralement, la prise en compte des coûts environnementaux du transport et singulièrement du transport aérien est un domaine dans lequel l’Europe pourrait aller plus loin et surtout plus vite. Cela fait maintenant des années que ce principe est acquis mais on en attend toujours la traduction dans les faits. Si l’on veut éviter que les maigres efforts réalisés dans le cadre du processus de Kyoto paraissent bientôt dérisoires en regard du surcroît d’émission généré par le transport aérien, c’est aujourd’hui qu’il faut agir, pas demain.