Interpellation de Monsieur Joseph PARMENTIER à M. Didier GOSUIN

UN VERITABLE CADASTRE

Monsieur le Ministre, notre Région a dépensé énormément pour des audits de type Waterleau ou Merlin dans le domaine de la politique de l’eau et je ne vois pas que des efforts budgétaires similaires aient été accomplis pour ce qui concerne le trafic aérien. Or, la matière est au moins aussi importante pour toutes les bruxelloises et tous les bruxellois. Je ne veux certainement pas vous inciter à faire une nouvelle fois appel à des bureaux d’études privés mais bien à investir dans le service public.

Car, pendant que nous restons inactifs, le Ministre Anciaux persiste à mener sa politique personnelle en dépit de l’arrêt de la Cour de Cassation intervenu le jeudi 4 mars 2004.

Il fonde cette politique de « dispersion » sur des études menées par la KUL et un certain bureau hollandais AAC et il qualifie ces études de « cadastre du bruit », appellation nettement usurpée.

Et dans le même temps, il diffuse une lettre auprès des habitants de mon quartier de Laeken en appelant à « plus de solidarité ». Je tiens cette lettre à la disposition de tous, c’est vraiment édifiant d’hypocrisie.
Je vous interpelle de manière récurrente sur la nécessité impérative de disposer d’un véritable cadastre du bruit bruxellois. Où en sommes-nous aujourd’hui ? La population attend une réponse précise.

Je sais, vous allez encore me répondre que la BIAC ne veut pas vous livrer certaines informations utiles. Je pense toutefois qu’elles ne sont pas indispensables pour que l’IBGE s’attelle sérieusement à la confection de ce cadastre du bruit.

Je suggère au moins que nous disposions d’une ligne de conduite méthodologique. Il faut que notre commission de l’environnement rencontre des spécialistes qui viendraient nous exposer quelle va être la stratégie de la Région pour ce qui concerne la mise sur pied de notre propre cadastre contradictoire. Jusqu’à présent, je n’ai rien vu d’autre que quelques notions de base sur le site de l’IBGE mais rien de bien sérieux comme approche scientifique spécifique au territoire de notre Région, même si je dois reconnaître le fait que le site Internet de l’IBGE s’améliore nettement et que les mesures de bruit effectuées par les deux sonomètres fixes et les 11 stations mobiles y sont présentées plus clairement qu’avant. Mais les mesures cosmétiques ne sont pas suffisantes. Il faut développer une véritable expertise et une méthodologie fondée techniquement et politiquement.

Pratiquement, je vous serais très reconnaissant, Monsieur le Ministre, de me procurer un organigramme de l’IBGE détaillant le nombre des agents qui s’occupent des questions d’aéronautique et décrivant leurs compétences particulières en ce domaine ainsi que le temps qu’ils consacrent à ces questions. Je pense que ces précisions seront de nature à mieux éclairer la population sur les efforts que votre département déploie pour mieux connaître ce dossier brûlant.

LE PERMIS D’ENVIRONNEMENT DE LA BIAC

J’ai pu heurter des sensibilités administratives en affirmant une certaine faiblesse bruxelloise dans la collecte et dans la maîtrise de l’information pour ce qui concerne cette problématique du trafic aérien. Je le constate encore une fois et déplore aujourd’hui, comme d’habitude, que nous ayons manqué de pro activité. Rien n’a changé!

Certains de mes collègues vous ont interpellé sur le suivi de la demande de permis d’environnement introduite par la BIAC. Permettez-moi quand même de vous poser la question fondamentale qui est jusqu’à présent passé sous silence : pourquoi avons-nous dû attendre le 26 janvier 2004 et l’annonce par la BIAC du dépôt d’une nouvelle demande de permis d’environnement pour les vingt années à venir ? Comment est-il possible que nous ignorions que l’ancien permis allait venir à échéance ? Où sont les spécialistes bruxellois de cette problématique ? Est-ce que personne à l’IBGE ne connaissait cette histoire de permis d’environnement avant que le fédéral vous communique cette information, comme vous l’indiquiez dans votre réponse à ces questions d’actualité du 20 février 2004, démontrant ainsi que votre administration n’a pas anticipé cette annonce ?

Vous avez donc suggéré à la dernière minute à 8 communes bruxelloises sur 19 de mener leurs propres enquêtes publiques. Certains ont mis en doute la validité juridique d’une telle démarche et je partage leur scepticisme. Pourquoi n’avoir pas agi plus tôt et plus sûrement ? N’aurait-il pas été plus sage et avisé de charger l’IBGE d’une mission sur le long terme afin d’agir de manière concertée avec les communes visées par cette enquête publique ? Ce que je déplore, Monsieur le Ministre, c’est que nous suivions les événements au lieu de les précéder.
Vous avez annoncé le 18 février 2004 que vous aviez désigné un avocat chargé de défendre les intérêts de la Région dans ce dossier. Pourriez-vous nous indiquer l’étendue de sa mission et les compétences particulières de ce conseil dans le domaine aérien ?

Plutôt qu’un avocat, c’est d’une bonne équipe de technicien dont nous devrions nous doter. Par ailleurs, je me permettrai d’ajouter une couche : il faudra aussi que nous nous intéressions un jour aux nuisances atmosphériques provoquées par les avions car il n’y a pas que les pollutions sonores qui doivent nous préoccuper.
Pendant ce temps-là, en date du 29 janvier 2004, la BIAC se fend d’un communiqué de presse affirmant que les nuisances sonores ont diminué de manière significative depuis 1999 « grâce surtout à l’utilisation d’avions plus modernes et moins bruyants ». BIAC s’appuie sur la quantité totale de bruit émise la nuit en fonction d’une unité de mesure établie au moment de la certification de l’avion lors de sa mise en service. Allez raconter cela à ceux qui ne peuvent plus dormir la nuit ! La BIAC pousse le cynisme jusqu’à ajouter que seuls 10.000 riverains sont concernés par les nuisances sonores liées à l’activité aéroportuaire nocturne. Avons-nous les moyens de réfuter ce genre d’affirmations basées sur une formule déterminée par un chercheur néerlandais au départ du bruit réellement produit et de sa perception ?

MENACES DE PRIVATISATION

Enfin, cerise sur le gâteau, on apprend que l’Etat fédéral a l’intention de céder au privé les 63,6% des parts qu’il détient dans le capital de la BIAC. Est-ce que les pouvoirs publics vont pouvoir continuer à jouer leur rôle de régulateurs dans ce dossier ? Il devient vraiment urgent de mettre sur pied une autorité publique de contrôle indépendante et bien équipée en personnel et en matériel. Pour ma part, je continuerai à me battre pour que cette problématique soit gérée par la collectivité et contrôlée démocratiquement.

Mais l’actualité nous amène son lot de velléité de privatisation dans tous les domaines connexes à cet aéroport. Je lis dans le quotidien « Le Soir » du 27 février 2004 que Monsieur de Donnea voudrait confier la confection d’un plan catastrophe à un bureau d’études spécialisé en disant qu’il en existe « qui font cela à merveille ». Je ne partage bien évidemment pas son opinion mais, à force de déshabiller le service public, il est clair que c’est au privé que reviendront les budgets dans toutes ces matières. Je crains fort que la campagne électorale déjà ouverte nous réserve encore bien des foucades de ce genre.

L’ULTIME PLAN ANCIAUX

Les plans du Ministre Anciaux évoluent quasiment d’heure en heure, de sorte qu’il est difficile d’épingler quoi que ce soit de sérieux et de fiable. Cependant, il a affirmé, entre autres, qu’il avait mené une concertation avec la région bruxelloise. En fait il semblerait que ce Ministre prenne pour une concertation une simple réunion informelle avec vous, Monsieur le Ministre. Avez-vous réagi face à de tels mensonges ?

Dans le cas où certains éléments du plan Anciaux seraient quand même mis en œuvre, pouvez-vous me dire si vous avez prévu une parade par l’installation de nouveaux sonomètres par l’IBGE car les deux Woluwe sont demanderesses pour ce type d’appareil de mesure. Où en est ce dossier, quels seront les lieux choisis, et quand les sonomètres seront-ils installés ?

Je vous pose cette question car je me demande si vous vous êtes rendu compte que plusieurs nouvelles routes survoleraient le territoire de la région bruxelloise, comme la route CIV 8 C qui a été une nouvelle fois encore modifiée avec risque accru de survol de Laeken, ou encore la CIV 5 lima qui monte sur Woluwe-Saint-Pierre avant de traverser tout Bruxelles, sans parler de toutes les routes vers le nord du dimanche qui montent sur Woluwe-Saint-Pierre jusqu’au moment où elles atteignent 1.700 pieds puis virent vers Saint-Lambert, Evere et Schaerbeek. Il s’agit d’une toute nouvelle procédure qui n’avait jamais existé auparavant.

L’accord du 16 juillet 2002 prévoyait que pendant la première année d’évaluation des nouvelles procédures de nuit, la Région de Bruxelles-Capitale ne poursuivrait plus les infractions à son décret bruit. L’accord du 24 janvier 2003 a mis à néant les précédents accords, depuis le 31 octobre 2003, plus rien n’interdit la Région de ne pas faire appliquer le décret relatif au dépassement des volumes de bruit lors du survol de Bruxelles. Où en est l’application de ce décret ? Avez-vous donné, Monsieur le Ministre, des instructions à votre administration pour reprendre la constatation des infractions ? Des sanctions seront-elles infligées aux compagnies ? De même l’accord du 22 février 2002 prévoyait que BIAC et les compagnies aériennes retireraient leurs recours contre ce décret, ces promesses ont elles dépassé le cap des bonnes intentions ?

PLAN FEDERAL DE DEVELOPPEMENT DURABLE

J’aimerais enfin connaître vos intentions pour ce qui concerne la contribution de notre Région dans le cadre de l’avant-projet de plan fédéral de développement durable 2004-2008. A ma connaissance, pas un mot n’y figure pour ce qui concerne le transport aérien. Ne pensez-vous pas qu’il y aurait lieu d’insister sur cet aspect de la question compte tenu des compétences que chaque Région exerce dans le domaine environnemental ?