Peser de tout son poids économique, c’est l’intention affirmée de la société anonyme BIAC à la faveur d’une étude qu’elle a commandé à l’ULB et la KUL.
Ce n’est pas vraiment une nouveauté : peser sur la décision politique, c’est que fait M. Klees, qui la
dirige, depuis sa création. Présente dans les principaux cabinets ministériels par le biais de ses administrateurs, BIAC y déploie un lobbying intense et efficace, quel que soit le ministre des Transports ou les couleurs du gouvernement.
Cette étude précise que la présence de l’aéroport générerait 3, 840 Milliards d’Euro et qu’elle procurerait 60.000 emplois directs et indirects. Le porte-parole de l’aéroport, M. De Backer, précise que l’aéroport emploie actuellement 20.000 personnes mais qu’il pourrait passer à 45.000 si on autorise BIAC à doubler le nombre de ses vols. Un des auteurs de l’étude rappelle les 4.000 emplois de DHL, qui selon lui, quitterait la Belgique si cette société ne pouvait plus voler la nuit.
Le message aux hommes politiques et aux syndicats est clair : BIAC vous rapporte de d’argent et procure des emplois, son aéroport n’est pas saturé, ne l’empêchez donc pas de doubler ses vols, ni de voler la nuit.
Au nom du profit d’un certain nombre de sociétés et de l’emploi d’un certain nombre de personnes, le gouvernement devrait sacrifier l’intérêt général. Plus de 300.000 riverains sont perturbés dans leur sommeil ou dans leur vie quotidienne. Les atteintes à leur santé et à celle de leurs enfants sont établies par de nombreuses études scientifiques étrangères.
L’aéroport n’est évidemment pas saturé, il pourrait encore avoir une belle croissance, malheureusement il n’a pas réalisé ses investissements à l’endroit qui convient à ses ambitions. Situé au coeur de la région la plus densément peuplée du pays et à 2 km d’une ville d’un million d’habitants, il aurait tort de considérer les riverains comme quantité négligeable. Munich et Oslo ont dû déménager
pour ces raisons.
Pour l’association des riverains Bruxelles Air Libre Brussel, on ne peut pas tout se permettre au nom de l’économie et de l’emploi. Pour Air Libre, la réalité est d’ailleurs bien différente.
BIAC a investi des millions d’euros dans une nouvelle jetée pharaonique sous-utilisée, qui devrait permettre à l’aéroport d’accueillir 40 millions de passagers par an, et ils sont moins de 20 millions aujourd’hui. M. Klees ne peut reconnaître cette erreur d’appréciation et veut à tout prix préparer la mise en bourse de BIAC avec la garantie de pouvoir passer à 492.000 mouvement par an (contre 256.000 en 2002). Il veut aussi pouvoir répondre à le demande de DHL de pouvoir doubler chez lui ses vols de nuit en agitant la menace du risque de délocalisation.
Pas question que DHL place ses vols sur un autre aéroport, même belge. M. Klees fait aussi le yeux doux depuis longtemps à Ryanair pour l’attirer en terre zaventemoise. Ce n’est évidemment pas de défendre l’économie du pays qu’il s’agit, celle-ci s accommode fort bien de Ryanair à Charleroi ou d’un éventuel transfert des vols de nuit à Chièvres ou ailleurs. C’est l’économie de la société qu’il
dirige que M. Klees défend et pour cela il est prêt à tout. Il vient même d’obtenir que ce soit à BIAC que le ministre Anciaux décide de confier le soin de réaliser une étude sur la rentabilité des vols de nuit. On connaît déjà la réponse.
Voilà le monde politique averti : BIAC va peser lourd. Les citoyens vont observer la capacité de leurs élus à résister à ces pressions et à définir sereinement la spécificité et les limites de l’aéroport de Zaventem, dont BIAC n’est finalement que le gestionnaire.