Relier l’aéroport de Zaventem à Charleroi en 9 minutes: le projet belgo-suisse pour régler le problème du survol de Bruxelles

Lalibre.be
14 juillet 2016

Neuf minutes. C’est le temps qu’il faudra pour relier, en métro-avion, l’aéroport de Bruxelles-National à celui de Charleroi d’ici 5 à 10 ans. On pourrait croire à de la science-fiction. Pourtant, selon les promoteurs de cette idée, deux Belges et deux Suisses, ce projet est plus que réaliste et permettrait de mettre un terme à la question délicate du survol de Bruxelles. “Brussels Airport est le dernier aéroport européen dont les avions ayant décollé depuis 10km ont survolé un minimum de 120 000 habitants (250 000 lors du plan Wathelet)”, explique Gérard Delruelle, ancien président de Cockerill-Sambre et l’un des porteurs du projet. « Si l’on ne fait rien, d’ici quelques années, cet aéroport sera fermé par décision judiciaire ».

On ferme les pistes à Zaventem, mais pas l’aérogare

L’idée ? Fermer les pistes de Zaventem et emmener tous les passagers et leurs bagages, via un métro-avion sous terre, vers un nouvel aéroport à Charleroi. “Les passagers auront le choix : soit faire leur “check-in”, les formalités de contrôles est leurs achats à l’aérogare de Zaventem, pour être ensuite emmenés via ces métros-avions en neuf minutes jusqu’aux pistes de Charleroi. Ils peuvent aussi directement embarquer via l’aéroport wallon ”, développe l’ancien député.

Des métros-avions, dites-vous ? “L ‘idée de base est de faire circuler à 30 mètres de profondeur un train constitué de cabines d’avions pressurisées dans des tunnels où l’air est raréfié », explique le professeur Marcel Jufer de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne. « Ce train est comparable à un avion volant à 10 000 mètres d’altitude : la résistance de l’air est faible et la consommation faible ».

D’après l’ingénieur, le train, supporté et guidé magnétiquement, peut aller à une vitesse constante de 400km/h. “Il est propulsé par des moteurs linéaires et son seul carburant est de l’énergie électrique”.

Un « vieux » projet suisse avorté

En fait, le projet ressemble à celui de “l’hyperloop” américain, sauf qu’il est plus réaliste d’après ces concepteurs. “L’hyperloop qui peut atteindre 1200km/h, c’est pour le futur, explique M. Delruelle. Notre projet c’est pour demain”.

Car les technologies de ces métros-avions ne sont pas neuves : elles se basent sur un projet existant depuis plus de 25 ans et développé par l’école polytechnique fédérale de Lausanne, appuyée, à l’époque par 85 entreprises suisses. “En 1990, nous avions proposé de relier avec ce système les principales villes suisses, pays où la réalisation d’une ligne TGV est pratiquement impossible à cause de la topographie et des expropriations conduisant à des coûts exorbitants, explique M. Jufer. La technologie était prête, mais le gouvernement suisse a choisi de donner la priorité au tunnel ferroviaire sous le Gothard, projet qui vient d’être achevé”.

« Flamands, Bruxellois et Wallons sont gagnants »

D’après M. Delruelle, qui songe également relier les deux grands aéroports parisiens, Roissy et Orly, avec ce système de métro-avion, le projet belge serait un win-win pour tout le monde. “Les Flamands pourraient construire une nouvelle ville sur la surface libérée à Zaventem, les Bruxellois ne seraient plus survolés et les Wallons auraient un nouvel aéroport ».

L’idée est belle, mais est-elle réaliste financièrement? Ce projet coûterait 40 millions d’euros par kilomètre, soit près de 2 milliards d’euros pour construire un tunnel souterrain de 50km entre Zaventem et Charleroi. “Rien que la valeur des terrains libérés à Zaventem est d’au minimum 4 milliards d’euros, soit de quoi payer la totalité de l’investissement : nouvel aéroport et liaison métro-avion”, s’enthousiasme M. Delruelle. Les métros-avions feront-t-ils écho au sein du monde politique belge ? “Nous ne faisons que proposer, conclut l’entrepreneur belge. A eux de décider. Si les Européens ne veulent pas de notre projet, nous irons en Chine”.

Raphaël Meulders