La Cour Européenne des Droits de l’Homme vient de prononcer ce 16 novembre 2004 un nouvel arrêt en matière de nuisances sonores (cfr. pièce jointe) :
– Une ressortissante espagnole se plaignait du bruit important causé par des discothèques qui avaient été autorisées dans son quartier par l’administration.
– Madame MORENO GOMEZ se plaignait donc de ne pas pouvoir dormir, ainsi que de sérieux problèmes de santé.
– Elle introduisit un recours et sollicita une somme d’argent « pour les dommages subis et le coût de l’installation d’un double vitrage » (voy. § 20).
– Ses recours étaient fondés notamment sur l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH), mais ils furent rejetés par les juridictions espagnoles.
– Madame MORENO GOMEZ décida alors de déposer une requête à la Cour de Strasbourg.
– Celle-ci vient de lui donner raison en retenant une violation de l’article 8 CEDH.
La motivation de l’arrêt nous paraît extrêmement intéressante pour les riverains de Zaventem :
– La Cour de Strasbourg confirme tout d’abord que le droit au respect du domicile (article 8 CEDH) est conçu « non seulement comme le droit à un simple espace physique, mais aussi comme celui à la jouissance, en toute tranquillité, dudit espace » (§53).
– Elle confirme que le bruit peut constituer une ingérence au sens de l’article 8 CEDH.
– La Cour confirme que les autorités ont donc une obligation positive d’agir même si l’ingérence concerne avant tout des particuliers (par exemple : un exploitant contre riverain) : « Si l’article 8 a essentiellement pour objet de prémunir l’individu contre les ingérences arbitraires des pouvoirs publics, il peut aussi impliquer l’adoption par ceux-ci de mesures visant au respect des droits garantis par cet article jusque dans les relations des individus entre eux » (§ 55).
– La Cour rappelle sa jurisprudence selon laquelle la Convention vise à protéger des « droits concrets et effectifs », et non « théoriques ou illusoires » (§ 56).
– MAIS SURTOUT, la Cour fonde son constat de violation de l’article 8 CEDH sur « l’inactivité des autorités pour faire cesser les atteintes causées par des tierces personnes » (§ 57), sur « l’inobservation réitérée de la réglementation » que les autorités ont établie (§ 61) et sur la « passivité de l’administration face au tapage nocturne » (§ 61).
Cette jurisprudence doit conforter les riverains de l’aéroport de Zaventem lorsqu’ils reprochent une violation de l’article 8 CEDH aux autorités belges dans le cadre des nuisances sonores qu’ils subissent.
Notamment, alors que les nuisances sonores nocturnes se prolongent depuis près de 20 ans, les autorités belges n’ont jamais adopté la moindre mesure pour insonoriser ou exproprier les immeubles des victimes de l’aéroport. Il est d’ailleurs manifeste qu’elles n’envisagent pas de le faire puisque l’actuel plan de dispersion des nuisances rend techniquement et budgétairement impossible tout avancée à ce sujet.
Cette situation s’apparente donc à une « inactivité » ou à une « passivité » (pour rependre les termes de l’arrêt .) dans le chef de l’administration belge qui s’abstient d’envisager les mesures qui s’imposent pour assurer une véritable protection « concrète et effective » (et non « théorique ou illusoire ») des droits que les riverains tirent de l’article 8 CEDH.
De toute évidence, cette nouvelle jurisprudence est de nature à intéresser tous les riverains de l’aéroport, quelle que soit leur lieu de résidence.
Pour la SPRL MISSON BUREAU D’AVOCATS
Luc MISSON et Laurent WYSEN