« L’aug­men­ta­tion du sur­vol est une at­teinte au droit à la santé des ri­ve­rains. » Auditeur Conseil d’Etat

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07 décembre 2016

Notre commentaire : cette victoire (avec l’annulation de toutes les phases du plan Wathelet) ne pourra que déboucher sur une remise en cause totale de toute la politique aéroportuaire, un large débat public, une redéfinition de toutes les routes et pourquoi pas une requalification de cet aéroport mal placé….Heureusement, l’Arrêté bruit de la Région de Bruxelles Capitale existe et les routes Chabert et Denut n’ont de facto aucun avenir…

 

Retour massif du survol de Bruxelles en vue

 © BELGAIMAGE

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Pour le premier auditeur du Conseil d’Etat, le plan Wathelet pèche par l’absence d’étude d’incidence sur la santé et un défaut de consultation publique. C’est le retour de la route Chabert qui traverse Bruxelles, et de celle qui survole le domaine royal de Laeken.

Disparu des radars depuis quelque temps en raison du moratoire imposé par une décision de justice de juillet 2014 visant sa 6e phase, le plan de survol de l’ex-ministre Melchior Wathelet (cdH) refait de nouveau parler de lui. Selon nos informations, le premier auditeur du Conseil d’Etat, Denis Delvax, recommande d’annuler purement et simplement toutes les phases du « plan Wathelet ». Après avoir analysé plusieurs aspects du dossier, il a rejeté plusieurs griefs portés par les requérants (riverains et associations à l’origine du recours). Il s’agit notamment de la violation des articles 10 (égalité des Belges devant la loi) et 11 (jouissance des droits et libertés sans discrimination) ainsi que de celui portant sur une méconnaissance de l’objectif d’une politique générale de développement durable.

« L’augmentation du survol est une atteinte au droit à la santé des riverains. »

denis delvax auditeur au conseil d’etat

Toutefois, il estime que la critique portant sur une méconnaissance du droit à la protection de la santé avancée par les requérants est fondée. En clair, le plan Wathelet pèche par l’absence d’étude d’incidences sur la santé et un défaut de consultation publique. « Il peut difficilement être contesté que le passage d’avions au-dessus du territoire bruxellois (…) engendre une augmentation des nuisances sonores subies (…) par les habitants de cette région, spécialement pour ceux qui n’étaient pas antérieurement survolés par les avions, observe le premier auditeur. Cette augmentation, a fortiori lorsqu’elle intervient pendant la nuit et donc les heures auxquelles les requérants et les Bruxellois sont amenés à se reposer, constitue une atteinte au droit que leur reconnaît l’article 8 de la Convention (de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales). La partie adverse (Etat belge) ne peut toutefois démontrer qu’elle a mis en balance les intérêts des requérants et ceux des habitants de l’Oostrand (Woluwe-Saint-Pierre, Woluwe-Saint-Lambert, Crainhem, Wezembeek-Oppem, etc., NDLR) en ce qui concerne l’atteinte au droit à la santé. »

Le premier auditeur utilise l’étude par l’Institut de gestion de l’environnement et d’aménagement du territoire (Igeat/ULB) réalisée à la demande de l’Etat fédéral contre ce dernier, car elle « fait, au contraire, apparaître une augmentation substantielle du nombre de personnes subissant des nuisances sonores, particulièrement en raison de l’utilisation accrue de la route du Canal« .

Ardoise salée pour l’Etat

Après une argumentation bien charpentée, le premier auditeur estime qu’il faut annuler tout le plan Wathelet, mais c’est à tout le gouvernement fédéral qu’il demande de revoir sa copie. « Il y a lieu d’annuler l’instruction ministérielle d’exécution des accords du Conseil des ministres des 19 décembre 2008 et 26 février 2010 en matière de procédures de décollage et de sélection des pistes; clarification et fixation des valeurs de composantes de vent applicables à l’aéroport de Bruxelles-National, adressée le 15 mars 2012 par le secrétaire d’Etat à la Mobilité à l’administrateur délégué de Belgocontrol« , conclut Denis Delvax.

L’ardoise risque aussi d’être salée pour le Fédéral, car l’auditeur demande qu’il paie les droits de recours supportés par les requérants et l’indemnité de procédure de 350 euros à chaque requérant. Le recours a été introduit le 7 avril 2014 par l’association Bruxelles Air Libre Brussel et 7 riverains à titre individuel. Trois autres riverains se sont joints à l’action et 2 associations de défense des riverains (Awacs, Wake up Kraainem).

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Survol du domaine royal

Si le Conseil d’Etat suit l’avis de son premier auditeur, comme il le fait dans plus de 90% des cas, les conséquences vont probablement et paradoxalement pénaliser les Bruxellois. Car selon des observateurs, l’annulation du plan Wathelet (dont les phases 1 à 5 sont toujours d’application) suppose la remise en service de la Route Chabert le samedi et le dimanche, avec un survol intensif de Haren, Evere, Schaerbeek, Saint-Josse, Bruxelles-Ville (Grand-Place, Bourse, Marolles), Forest, Saint-Gilles et Uccle. Cela entraînera aussi la remise en piste en service de jour de la route Denut. C’est celle-ci qui était empruntée, de jour comme de nuit, avant le plan Wathelet, par tous les décollages vers les USA au-dessus de plusieurs communes (Haren, Evere, Schaerbeek) avec un virage large vers Neder-Over-Hembeek, Laeken et Jette.

Elle ne respecte pas l’interdiction de survol du Domaine royal de Laeken. Il apparaît donc que les requérants risquent d’obtenir finalement une décision de justice qui va les desservir. L’association UBCNA déjà prévenu plusieurs bourgmestres de la situation et va tout faire pour contrer l’annulation du plan Wathelet. « Nous, au sein de l’UBCNA, mettrons tous les moyens en œuvre pour contrer toute intensification du survol de Bruxelles, et nous nous opposerons par toutes voies de droit au retour des routes Chabert et Denut et à toute intensification du virage vers la gauche« , a écrit sa responsable, Peggy Cortois à plusieurs bourgmestres et mandataires politiques à Bruxelles dans un courriel que nous avons pu consulter.