Volcans : petite leçon de « slow economy »

Volcans : petite leçon de « slow economy »

par KUCZKIEWICZ,JUREK

lundi 19 avril 2010, 07:54

La société « zéro défaut »,

ce système idéal dont l’incident, par principe insupportable, doit être exclu, n’est pas qu’un fantasme des citoyens individuels : il l’est aussi devenu pour les entreprises et les corps sociaux organisés. L’interdiction de vol prise par les autorités n’était pas en vigueur depuis trois jours, que des voix s’élevaient pour questionner un respect démesuré par les autorités du sacro-saint principe de précaution. Les compagnies aériennes, pour leur part, n’ont pas patienté plus longtemps pour interpeller les autorités sur la nécessité d’aides d’Etat aux entreprises du secteur : à défaut de voler, celles-ci atterriront peut-être bientôt dans des remous financiers. Remarquons au passage que les coûts importants que doivent d’ores et déjà encourir les compagnies aériennes, découlent notamment d’une législation draconienne, justifiée par le droit à la protection du consommateur : celui-là même qui, voyageant souvent et à bon compte, ne supporte pas le contretemps, et encore moins la désinvolture de certains transporteurs sans scrupule.

L’économie de marché libéralisée, qui permet au consommateur de consommer plus pour moins, et aux entreprises de gagner plus en courant plus de risques, est décidément bonne pour tout le monde quand tout va bien. Mais quand cela va mal, les uns comme les autres retrouvent rapidement le chemin vers le guichet de l’Etat-protecteur. On a aidé les banques (qui ont vite fait de l’oublier, dès les profits revenus), on aidera bien les compagnies aériennes. Mais après, on aidera qui ?

La question débouche sur une interrogation plus fondamentale encore : même si l’espace aérien européen se voit rouvert au trafic, une fois dissipé le nuage volcanique, il faut envisager que les éruptions islandaises pourraient n’en être qu’à leur début, et qu’elles affecteront nos économies de façon plus durable que le temps d’un passage nuageux. Moins de voyages au bout du monde, moins de marchandises produites à bas prix d’un côté de la planète pour être transportées par avion à l’autre bout : qui sait si les volcans islandais ne nous imposent brièvement un test grandeur nature de « slow economy » ?

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